Les technologies à double usage désignent les technologies ayant des applications tant militaires que civiles. Le gouvernement du Canada, en collaboration avec ses alliés de l’OTAN, s’est engagé à augmenter ses dépenses annuelles en défense pour atteindre 5 % du PIB d’ici 2035. Il s’agit d’une excellente occasion de contribuer au développement de technologies à double usage au Canada et à l’étranger, tant nouvelles qu’existantes.
Qu’est-ce qu’une technologie à double usage?
Les technologies à double usage peuvent initialement être développées à des fins militaires, puis trouver d’importantes applications dans le secteur privé (par exemple, le système de localisation GPS et Internet), ou vice versa. Elles couvrent un éventail de secteurs, notamment l’informatique, l’énergie, les télécommunications, la logistique et le domaine médical. Les technologies émergentes, telles que les technologies quantiques, l’intelligence artificielle et la cybersécurité, sont des exemples parfaits de technologies à double usage qui revêtent une importance capitale, tant en contexte militaire que civil.
L’augmentation des dépenses en défense présente des opportunités aux entreprises qui développent des technologies à double usage
Le Canada a joué un rôle de premier plan dans les activités de recherche et développement (R&D) précoces liées à des technologies telles que l’IA et les technologies quantiques. Cependant, transformer des activités de R&D fructueuses en entreprises opérationnelles prospères n’a jamais été chose facile. L’augmentation des dépenses consacrées en R&D et à la défense proprement dite pourrait donc constituer une occasion d’y parvenir.
L’engagement du gouvernement du Canada en ce qui concerne les dépenses en défense représente une augmentation considérable par rapport aux quelques 1,37 % du PIB consacrés à la défense en 20241. Jusqu’à 1,5 % de cet objectif de dépenses pourrait être affecté à protéger ses infrastructures critiques, défendre ses réseaux, libérer le potentiel d’innovation et renforcer sa base industrielle de défense, soit un engagement annuel de plus de 332 milliards de dollars américains3.
En plus de cet engagement à augmenter ses dépenses, le gouvernement du Canada a publié un nouveau plan de défense qui prévoit des investissements dans les technologies à double usage. La création de BOREALIS, un bureau de recherche, d’ingénierie et de leadership avancés en matière d’innovation et de science a d’ailleurs été annoncée, ayant pour but de faire progresser la recherche dans le domaine des technologies émergentes, telles que l’intelligence artificielle et l’informatique quantique, qui ont de toute évidence des applications à double usage.
L’augmentation des dépenses en défense comprendra également une augmentation des dépenses en approvisionnement auprès d’entreprises canadiennes et étrangères qui développent des technologies ayant des applications militaires. Il s’agit d’une occasion de générer des revenus continus alors que le gouvernement acquiert des technologies à double usage pour l’armée.
Au-delà du gouvernement, de nombreux accélérateurs et investisseurs ont lancé des programmes axés sur le secteur de la défense au Canada, notamment : le « Creative Destruction Lab Defence Stream », un programme destiné aux entreprises en démarrage qui développent des technologies à double usage4 la défense; Vimy Forge, un nouvel incubateur axé sur la défense au Canada atlantique; le bureau nord-américain de l’Accélérateur d’innovation de défense pour l’Atlantique Nord (DIANA) de l’OTAN ; et le fonds Calian Ventures qui aide les PME à tester,5 valider et mettre à l’échelle les technologies dans les marchés publics canadiens et alliés6.
Conserver son avantage concurrentiel dans le développement des technologies à double usage grâce à la propriété intellectuelle
L’un des principaux défis qui se posent pour les entreprises innovantes est de rester compétitives sur le marché à l’échelle mondiale. Des investissements considérables sont réalisés partout dans le monde pour cerner les avancées technologiques révolutionnaires, notamment dans les domaines de l’intelligence artificielle et de l’informatique quantique. Pour rester compétitives, ces entreprises devront conserver leur avantage technologique grâce à l’innovation continue ainsi qu’à des mesures de protection appropriées, tant sur le plan juridique que technique.
Dans le domaine des technologies émergentes, les actifs immatériels tels que les codes, le savoir-faire et les algorithmes constituent souvent une part importante de la valeur d’une entreprise. Les outils en matière de propriété intellectuelle sont donc essentiels pour protéger ces actifs et se tailler une place sur le marché. Cependant, les entreprises canadiennes qui exercent leurs activités dans le secteur des technologies émergentes accusent un retard dans le dépôt de demandes de brevets, et cette tendance semble particulièrement vraie lorsque ces secteurs passent à la commercialisation. En effet, une étude a récemment révélé que les demandes de brevets liés à la technologie quantique déposées au Canada par des entreprises canadiennes comptaient pour plus de 50 % en 2014 alors qu’elles comptaient pour environ 14 % en 2024.
Il est essentiel d’élaborer une stratégie en matière de propriété intellectuelle dès le départ afin de mettre en place des protections et des garanties appropriées pour protéger les investissements en R&D. Bien que les entreprises en démarrage et les PME ont souvent accès à des ressources limitées à leurs débuts, il existe des programmes de financement pour l’élaboration de stratégies et le dépôt de demandes en matière de propriété intellectuelle pour les entités canadiennes. La mise en place d’une telle stratégie en temps opportun peut contribuer à attirer des investissements privés et à conserver un avantage concurrentiel.
Une considération clé en matière de propriété intellectuelle est le choix entre la protection par brevet et par secret commercial. Pour les innovations qui peuvent être gardées secrètes (et qui ne peuvent pas faire l’objet de rétro-ingénierie), le secret peut être préférable au dépôt d’une demande de brevet qui divulguerait l’essentiel d’une invention. En ce qui concerne les technologies à double usage, le besoin de confidentialité peut être accru en raison de leurs applications potentielles dans le domaine de la défense. Il est donc d’autant plus important de mettre en place, dès les premières étapes de conception, des stratégies et des politiques rigoureuses en matière de secrets commerciaux (le cas échéant) et de propriété intellectuelle. Au-delà des protections juridiques, ces stratégies doivent également couvrir les outils physiques et technologiques nécessaires pour protéger les actifs immatériels essentiels tels que le savoir-faire et les données.
Bien que les secrets commerciaux resteront toujours un élément important de la stratégie en matière de propriété intellectuelle des entreprises qui développent des technologies à double usage, la protection par brevet peut s’avérer avantageuse lorsqu’il s’agit de remporter des contrats gouvernementaux. En effet, les règles relatives à l’approvisionnement du gouvernement exigent d’éviter toute violation des droits de propriété intellectuelle de tiers. Ainsi, un brevet pourrait empêcher l’acquisition de technologies par le gouvernement auprès de concurrents.
Les entreprises qui développent des technologies à double usage devront également surmonter d’autres obstacles juridiques et techniques, tels que le contrôle des exportations et d’autres exigences réglementaires qui s’appliquent aux technologies ayant des applications militaires. Les entreprises canadiennes devront rester vigilantes lorsqu’elles établiront des partenariats et des relations au sein de la chaîne d’approvisionnement afin de s’assurer qu’elles se conforment à ces cadres juridiques supplémentaires et qu’elles maintiennent la protection de leurs secrets commerciaux.
Conclusion
L’augmentation des dépenses dans le secteur de la défense offre de nouvelles opportunités pour les entreprises qui développent des technologies à double usage. Cependant, ces entreprises sont exposées à des enjeux supplémentaires sur les plans juridique et stratégique. Il est donc important d’élaborer des stratégies claires pour faire face à ces enjeux, notamment une stratégie globale en matière de propriété intellectuelle, afin de favoriser la croissance et le succès continus de l’entreprise.
Ce qui précède se veut une mise à jour régulière du droit réglementaire de la propriété intellectuelle et des technologies au Canada. Le contenu est informatif seulement et ne constitue pas un avis juridique ou professionnel. Pour obtenir de tels conseils, veuillez communiquer directement avec nos bureaux.
References.
- https://www.rbc.com/fr/leadership-avise/augmentation-des-depenses-de-defense-incidence-pour-leconomie-canadienne/
- https://www.nato.int/cps/en/natohq/topics_67655.htm?selectedLocale=fr
- https://creativedestructionlab.com/fr/streams/defence/
- https://www.calian.com/fr/ventures/
- https://www.lexology.com/library/detail.aspx?g=ea64fdb2-6d82-4cb3-9c44-ec0d96f0ed95
- https://www.qai.ca/2024-quantum-ecosystem-report
Publications et articles
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